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Elle renonce à l’IMG car son bébé lui sourit à l’échographie
Quand elle a appris que le bébé qu’elle attendait allait être gravement handicapé, Katyia Rowe a envisagé l’avortement. On l’avait prévenue : le cerveau de son enfant ne fonctionnerait jamais correctement. Il ne pourrait jamais parler, jamais marcher et il aurait besoin de soins très lourds au quotidien.
La jeune femme explique au Daily Mail qu’elle a finalement décidé de garder son fils, prénommé Lucian, après l’avoir vu sourire sur une échographie 3D.
« Nous étions effondrés quand nous avons appris que les anomalies cérébrales de notre fils étaient si graves qu’elles allaient lui gâcher la vie. Quand je l’ai vu sourire alors qu’il était encore dans mon ventre, j’ai su que je ne pouvais pas mettre un terme à sa vie. »
La mère savait que ça allait être difficile. « Mais ce n’est pas parce que sa vie risquait d’être courte ou différente qu’elle ne méritait pas d’être vécue. »
Lucian a donc vu le jour, ses parents étaient prêts à s’occuper de lui. Le destin en a voulu autrement. « J’ai fait des recherches sur ses handicaps pour me préparer pleinement à ses besoins. En regardant les photos de l’échographie, je savais que je faisais la bonne chose en lui donnant une chance. »
L’enfant n’a survécu que 9 heures mais Katyia ne regrette rien. « Ce fut les neuf heures les plus heureuses de ma vie. Lucian aurait pu mourir dans mon ventre mais il a tenu bon assez longtemps pour que nous puissions le voir. »
Katya et son conjoint auront probablement d’autres enfants. « J’avais toujours cru que je n’avais pas envie d’être mère mais Lucian m’a appris que c’était le travail le plus merveilleux du monde et je lui serai toujours reconnaissante pour cela. »
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« Être parent, frère ou soeur d’un enfant handicapé, cela s’apprend »
« (…) Mon mari était encore étudiant en médecine et moi juste licenciée en philosophie lorsque nous nous sommes mariés. Avant d’être professeur certifiée de lettres, je suis restée huit ans « pionne » dans un lycée. J’en garde un bon souvenir.
Durant tout ce temps, nous avons eu cinq enfants, dont une est née handicapée. Ce fut un choc terrible. Le fœtus avait attrapé un virus durant ma grossesse. J’ai beaucoup culpabilisé, j’ai même songé à disparaître avec mon enfant.
La rencontre déterminante d’une analyste et la réussite à l’agrégation de philosophie m’ont aidée à émerger. Marie-Hélène Mathieu, qui a créé l’OCH, m’a ensuite appris à communiquer avec mon enfant. Grâce à elle, j’ai compris (…) que si nous cessons de refuser le handicap et tentons d’accepter l’enfant handicapé tel qu’il est, nous acceptons ses silences, la vigilance qu’il demande au-delà du bruit de nos mots inutiles et de nos peurs.
Il peut y avoir alors des moments extraordinaires où l’on vit pleinement avec son enfant handicapé, même si reste toujours l’angoisse de ce qu’il deviendra après nous, dans sa vie d’adulte…
Etre parent, frère ou sœur d’enfant handicapé, cela s’apprend. Avec mon mari, nous avons senti, grâce à certaines rencontres, que le bonheur de notre fille dépendait de la façon dont nous vivions sa présence en famille, dont nous l’abordions.
Janine Chanteur, professeur émérite de philosophie morale et politique à l’université de Paris- Sorbonne
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Il ne faut pas avoir peur d’avoir un enfant trisomique
« J’ai moi-même un fils trisomique. Si je chante, c’est pour permettre à ces enfants de partir à la montagne, d’apprendre dans des écoles spécialisées. C’est aussi pour aider ceux qui travaillent à la recherche dans ce domaine. Et puis, je crois que mère Térésa avait raison lorsqu’elle disait que ces enfants étaient des professeurs d’amour. Leur pureté est déroutante : en société, mon fils sait ceux qui l’aiment et ceux qu’il gêne. Son dynamisme et sa joie de vivre sont exemplaires et épuisants.
Quand j’ai appris que mon fils était trisomique, j’ai été très choqué. Le médecin qui était là m’a dit que ce serait un végétal toute sa vie. S’il le voyait aujourd’hui… En fait, j’ai eu la chance d’avoir été éclairé par le professeur Marie-Odile Réthoré, qui m’a fait réaliser que c’était un enfant comme les autres, qu’il pourrait être heureux. Aujourd’hui, il est heureux.
Il ne faut pas avoir peur de mettre son enfant en contact avec le monde. Moi qui suis timide, j’avais peur de le faire sortir avec nous, mais ma femme m’a convaincu. J’ai vu que Rodrigo aimait beaucoup rencontrer les gens. Et qu’il se faisait toujours accepter. Nous l’emmenons le plus possible avec nous. Cet hiver, il a même skié, pour la première fois avec ses trois frères aînés. Quel plaisir de le voir dévaler les pistes noires ! »
Il ne faut pas avoir peur d’avoir un enfant trisomique. Il nous apporte énormément. Nous devrions spontanément les aimer. Le problème vient de nous, il ne vient pas d’eux ». »
Ruggiero Raimondi, chanteur, témoignage paru dans la revue Le Spectacle du Monde
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Garder un enfant handicapé ? L’échographie qui a changé ma vie
« Un troisième enfant maintenant ? Non, décidément, je ne voulais pas. Charlotte avait déjà 13 ans, Louis en avait 9. Quels liens pourraient-ils avoir avec un frère ou une sœur de dix ans plus jeune ?
Je ne me voyais vraiment pas, à 39 ans, en train de donner le biberon ou me relever la nuit pour calmer les pleurs d’un bébé.
Christophe, mon mari, ne me comprenait pas. Lui, l’idée d’avoir un enfant sur le tard l’enchantait : “Tu ne trouverais pas ça sympa ? Avec ce que je gagne, notre grande maison et toi qui ne travaille plus, pourquoi refuser cet enfant ?”
Il avait beau dire, je n’avais pas l’intention de céder. Cette grossesse était un accident, comme on dit, et j’entendais bien l’oublier au plus vite…Notre vie confortable, nos deux enfants sans problèmes, notre cercle d’amis à Toulouse remplissaient très bien ma vie.
Ça peut paraître égoïste, mais je voyais les choses comme ça. D’ailleurs, je n’ai pas caché mes intentions à ma gynécologue. Je la connais depuis quinze ans, elle est presque une amie. “Je vous comprends, Claire, m’a-t-elle dit, je vous demande juste de réfléchir un petit peu. De toute façon, nous allons faire une échographie, c’est nécessaire pour l’IVG.”
Basculement à l’échographie
Comment aurais-je pu me douter que cet examen allait changer ma vie ? J’étais enceinte de presque deux mois quand j’ai passé l’échographie.
Je me rappellerai, toujours le visage fermé de ma gynéco devant l’écran où elle voyait mon bébé. “Toujours décidée pour l’IVG ?” m’a -t elle demandée. J’ai fait oui de la tête. “ C’est sans doute mieux comme ça, a-t -elle dit, cet enfant ne se développe pas normalement.”
Elle a voulu m’expliquer sur l’écran ce qu’elle voyait d’anormal. Je l’écoutais à peine. Cet enfant, j’avais soudain envie de le garder. Peut-être parce qu’il avait un problème, parce que je me sentais responsable de lui, ou tout simplement parce que je me rendais compte qu’il avait déjà une existence…
« Cet enfant a besoin de toi »
En rentrant à la maison, je n’arrêtais pas de me répéter : “Claire, tu ne peux pas faire ça, cet enfant a besoin de toi.” Quand j’en ai parlé à mon mari, il m’a regardée avec des yeux ronds.
“Je n’arrive pas à te comprendre, m’a-t-il dit, ce matin encore, tu n’en voulais pas de ce bébé ! Et maintenant que tu sais qu’il a un problème, peut-être grave, tu veux le garder ?”
Je l’ai regardé droit dans les yeux : “Christophe, cet enfant, il faut que je le garde, je le sens, je ne peux t’expliquer pourquoi, mais je suis sûre d’avoir raison.”
Connaissant mon caractère têtu, mon mari n’a pas insisté. Il devait se dire que c’était une lubie, qu’après d’autres examens, je me rendrais compte de mon erreur, qu’il serait encore temps pour un avortement thérapeutique. C’est aussi ce que m’a proposé ma gynéco à mon quatrième mois de grossesse.
Un handicap accueilli
« Claire, maintenant, c’est certain, le cerveau de votre bébé est touché, mais dans quelles proportions, je ne sais pas.” Loin de me décourager, ce pronostic me donnait encore plus envie de mettre au monde ma fille.(…)
J’ai passé une amniocentèse, elle m’a rassurée, mon bébé souffrirait probablement de séquelles neurologiques, mais rien qui puisse l’empêcher de se développer normalement.
Christophe voulait quand même que j’avorte, mais mes enfants, à qui j’avais tout expliqué, ont eu une réaction toute différente. Charlotte m’a dit : “Tu verras maman, je t’aiderai à t’en occuper.” Je reconnaissais bien là la générosité de ma fille…
En entrant à la maternité, je me sentais sereine, en accord avec moi-même. Et mon accouchement, je l’ai beaucoup mieux vécu que les deux précédents.
Peur d’être père d’une enfant handicapée
Christophe avait préféré attendre dans le couloir. Je crois qu’il avait peur de voir cet enfant naître, peur de ce qu’il allait découvrir.
Ma fille était magnifique, plus belle que ne l’avaient été son frère et sa sœur à la naissance. J’en étais très fière.
Christophe m’a rejoint quelques minutes plus tard, il s’est dirigé vers moi, m’a demandé comment ça allait. En souriant, je lui ai dit “Tu ne regardes pas ta fille ?” Marion était avec l’infirmière pour sa pesée. Christophe a pris le bébé, l’a tenu un peu bêtement quelques secondes, puis il a dit : “Puisqu’elle est là, on va l’aimer cette petite…”
Nous avons échangé un regard complice. Je me suis dit que mon mari était vraiment un type bien… Marion a trois ans aujourd’hui, et mon choix de la garder, je ne l’ai pas regretté une seule seconde, même si notre fille souffre bien de problèmes neurologiques…
Elle ne parle pas très bien, elle a du mal à coordonner ses mouvements, comme si ses gestes ne répondaient pas à ce que lui commande son cerveau, et, du coup, elle casse beaucoup de choses. Mais que sont ces petits inconvénients par rapport à tout ce qu’elle nous a apporté ? A l’amour qu’elle nous donne ?
Handicap oublié ?
Charlotte et Louis ont pour leur petite sœur une véritable adoration, jouent avec elle, sont d’une patience formidable…Son comportement un peu bizarre ne les gêne pas du tout, au contraire : ils l’aiment encore plus parce qu’ils se sentent responsables. Grâce à eux, Marion fait beaucoup de progrès.
Christophe, qui était si inquiet, en oublierait presque son handicap. Quand il chahute pour rire avec Marion, je dois même lui rappeler qu’elle n’a que trois ans !
Transformation intérieure
Quant à moi, c’est bien simple, Marion m’a transformée. Ce sont toutes mes valeurs qui ont été bouleversées. Avoir de l’argent, une position sociale, tout ce dont j’étais si fière ne compte plus. Je me moque que certaines de nos relations se soient détournées de nous parce que la présence de notre fille les gênait – l’une de mes ex-amies a même osé me dire qu’elle nous plaignait d’avoir une enfant handicapée !
Avec Marion, j’ai appris le sens des priorités. Un “Je t’aime, maman” prononcé maladroitement, un petit exercice qu’elle réussit après dix échecs, la voir jouer heureuse dans le jardin avec son frère ou sa sœur…voilà ce qui compte ! Je suis devenue quelqu’un de meilleur, de plus profond, et ça, c’est à Marion que je le dois … »
Claire, témoignage paru dans Maxi
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J’allais avoir 40 ans…enceinte d’un enfant trisomique
J’allais avoir quarante ans. J’attendais mon sixième enfant. On m’a proposé l’amniocentèse. J’ai accepté pour rassurer ma famille, en pensant qu’à priori il n’y avait rien. Mais j’ai dit que de toute façon, quel que soit le résultat, je garderai l’enfant. On m’a répondu : “Vous n’avez pas de temps à faire perdre aux généticiens.”
J’ai tout de même fait une amniocentèse. L’examen ne s’est pas bien passé. L’infirmière me disait : “Regardez : il met sa petite main à la bouche ! ”. J’ai répondu : “C’est un non-sens de concrétiser l’enfant s’il faut l’éliminer en cas de pépin”. L’annonce du résultat s’est faite par téléphone. Le généticien nous a convoqués le lendemain avec mon mari. “On va prendre rendez-vous pour une interruption de grossesse”, nous a-t-il dit d’emblée.
Temps de réflexion
On a demandé une quinzaine de jours pour réfléchir, mais on savait qu’on allait le garder. Pour l’homme qui ne porte pas le bébé, c’est beaucoup plus dur. Mon mari pensait bien qu’il fallait le garder, mais il voyait davantage que moi les conséquences matérielles dans la vie quotidienne. Il se sentait écrasé. Moi, je pensais que quand on met un enfant en route, c’est un risque qu’on prend.
L’avenir de nos enfants, on ne le connaît pas. On ne sait pas ce qui peut leur arriver. Un autre ratera peut-être sa vie… alors que celui-là sera peut-être plus heureux, si on l’entoure. Je suis retournée voir le médecin pour lui faire part de notre décision. Il m’a dit : “Il faut que vous sachiez qu’un enfant trisomique sur deux est cardiaque, qu’il peut mourir à sa naissance ou dans les jours qui suivent… Vous êtes prévenue. Mais puisque vous avez décidé de le garder, on arrête tout examen complémentaire.”
« L’enfant qu’on a, on a choisi de l’avoir, tel qu’il est, sans regretter. »
Il est né effectivement, prématurément, à sept mois, avec un problème cardiaque. L’équipe de la maternité a été surprise quand je leur ai annoncé : “Je vais accoucher d’un enfant trisomique. » C’était la première fois qu’ils entendaient cela. Mais ils m’ont bien entourée et tout s’est très bien passé. Quand il est né, on m’a proposé la pouponnière pour m’aider, pour que la famille s’habitue. J’ai refusé.
Il a dû être opéré à quatre mois, après avoir failli mourir plusieurs fois. Quand j’ai dit au moment de ses opérations : “il est mal et il souffre”, le médecin a rejeté la pierre sur moi : “On vous a tout proposé”, m’a-t-il répondu, l’air de dire “c’est de votre faute si il souffre”.
Maintenant, tout est rentré dans l’ordre, il va bien et on est heureux. Évidemment, c’est pas toujours évident d’assumer. Mais on assume d’autant mieux que l’enfant qu’on a, on a choisi de l’avoir, tel qu’il est, sans regretter. »
Violaine
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J’ai choisi de donner la vie à bébé condamné
À cause d’une grave maladie génétique, on avait dit à Sabrina que la maternité n’était pas pour elle, qu’elle risquait sinon d’avoir un enfant handicapé. Mais quand l’impensable se produit, elle décide de devenir mère coûte que coûte…
« Mon bébé est un miracle »
Un adorable garçon aux yeux bleus qui pleure, rit et se réfugie dans les jupes de sa mère. Carson, 3 ans, ressemble à tous les autres petits enfants. Pourtant chacun de ses gestes bouleverse sa maman. « Mon bébé est un miracle, explique-t-elle. Je veux profiter de chacun de ses instants. » Son cœur tangue. Sabrina est née avec le mal de mère. Enfant, malgré des parents adoptifs aimants, elle a beaucoup souffert d’avoir été abandonnée. D’autant que sa mère biologique lui a laissé une très grave maladie génétique, incurable même, dans un très grand nombre de cas. « J’ai été adoptée quand j’avais 3 ans. J’ai souvent entendu mes parents évoquer la maladie de Duchenne, se souvient cette jeune femme de 35 ans. Je comprenais que c’était très sérieux. Mais comme ils avaient l’air de dire que c’était surtout grave pour les garçons, je n’ai jamais vraiment réagi. » A l’adolescence, elle apprend la triste vérité. « Quand j’ai atteint 14 ans, mes parents m’ont dit qu’ils avaient quelque chose à me révéler sur mes origines. » Elle apprend que la femme qui lui a donné la vie est porteuse du gène de la maladie de Duchenne. [….] L’adolescente doit se soumettre à une prise de sang. Le résultat est positif. « Pendant des années, j’ai refusé d’en reparler avec mes parents. […] Le gène qu’elle porte risque de compliquer ses projets de maternité. « Si jamais un jour vous avez un fils, il aura un risque sur deux d’être très malade et de mourir. » lui explique le médecin.
La maladie se révèle
Elle essaie de ne pas y penser. Sabrina termine ses études et devient aide soignante. Mais la réalité la rattrape : un jour, elle s’évanouit pendant son service à l’hôpital. Diagnostic : elle souffre d’un souffle au cœur, une pathologie neuromusculaire, une des premières conséquences du gène de Duchenne. Impossible désormais de se voiler la face. « A 21 ans il a fallu me poser un pacemaker. En plus on m’a annoncé que mon cœur ne supporterait pas une grossesse. « Pour Sabrina, cette nouvelle est dure à entendre car elle commence justement à rêver de fonder une famille… Les médecins lui suggèrent alors d’adopter, tout comme ses parents à elle l’ont fait jadis. Avec son « patrimoine » génétique, c’est sans doute la meilleure solution. « Par chance, David, mon fiancé, a été formidable. Il m’a demandée en mariage et j’ai décidé de faire le deuil d’un enfant biologique. »
Découverte d’une grossesse
Pendant 8 ans, le couple vit heureux sans enfant. Il est loin d’imaginer que l’impensable va se produire. Un acte manqué peut être : à 31 ans, Sabrina découvre qu’elle est enceinte. Un oubli de pilule. « David était très inquiet, il m’a tout de suite dit qu’il fallait avorter. » Pourtant Sabrina ne peut s’empêche de rêver. Et si la vie lui avait fait ce cadeau ? D’autant que son cardiologue constate que l’état de son cœur s’est amélioré et pourra supporter une grossesse. « Je me suis imaginée maman d’une petite fille qui, elle, vivrait longtemps. » En revanche si c’est un garçon, elle sait qu’il mourra très jeune…
« La vie de cet enfant, si courte soit-elle, vaut tout de même la peine d’être vécue »
Sabrina va devoir patienter onze longues semaines avant de connaître le sexe de son enfant. On lui communiquera les résultats de l’amniocentèse par téléphone. « Madame, j’ai une bien mauvaise nouvelle… » Son mari a compris ce qui se passait quand il a vu Sabrina hagarde, s’effondrer dans le canapé en raccrochant le combiné. « C’était affreux. Je portais un petit garçon à qui j’ai transmis la maladie. Un bébé condamné, dit-elle. Malgré tout, je voulais qu’il vive cette petite vie. » Elle n’avortera pas. David, son mari, comprend les motivations de sa femme, surmonte ses doutes et décide de la soutenir dans son choix. Après tout, la vie de cet enfant, si courte soit-elle, vaut tout de même la peine d’être vécue. C’est une lourde décision, sans doute la plus difficile de toute leur vie. Mais c’est un pari aussi. « Une spécialiste nous a expliqué que la santé de notre petit garçon commencerait à se dégrader dès la première semaine après sa naissance. Elle nous a dit que ses muscles et ses bronches le lâcheraient progressivement et qu’il était possible qu’il meure dès l’âge de 10 ans.[…] Elle nous a aussi fait remarquer que 10 ans c’est long et que d’ici là, la science pouvait encore faire des progrès importants. »
« Les douze premiers mois, nous avons vécu un rêve »
En 2007, Sabrina donne donc naissance à un petit Carson, par césarienne, dans une maternité de Manchester, en Grande Bretagne. Un beau poupon qui ressemble à tous les autres bébés. « Les douze premiers mois, nous avons vécu un rêve. » Mais quand, à son premier anniversaire, l’enfant ne tient toujours pas sur ses jambes, Sabrina et David comprennent que le terrible compte à rebours est lancé… Carson a commencé à marcher et à parler un peu avant l’âge de 3 ans. Ses parents en sont persuadés : il va se battre, et eux aussi, de toutes leurs forces !
Son fils peut y arriver. La jeune mère en est certaine depuis qu’elle a lu l’histoire incroyable d’un jeune homme de 21 ans, né lui aussi avec la maladie de Duchenne. Un certain Carl Tilson qui a consacré sa vie à la recherche contre cette dystrophie. « Il fallait que je le rencontre. », se souvient Sabrina. Je lui ai envoyé un message sur son site internet et il m’a immédiatement proposé de lui rendre visite à l’hôpital. »
De nouveaux espoirs
Elle est entrée dans la chambre du patient sur la pointe des pieds, une infirmière l’a prévenue qu’il serait sans doute très fatigué. Carl ne se retourne pas pour l’accueillir. Il ne lui tend pas la main. Il ne le peut plus parce qu’aujourd’hui, il est complètement paralysé. A 21 ans, tous ses muscles l’ont lâché à cause de la maladie. « Il fallait bien que je sache dans quoi nous nous étions engagés. » explique la jeune femme. Sabrina appréhendait un peu cette entrevue mais au final, elle ne l’a jamais regrettée. Au contraire la rencontre l’a galvanisée. Grâce à lui, elle nourrit de nouveaux espoirs par rapport à son fils. Même si elle comprend que le jeune homme est en train de vivre ses dernières semaines, elle est éblouie par le chemin qu’il a parcouru. Il a déjoué les statistiques en vivant 10 ans de plus que ce que lui prédisaient les médecins. Et il a aussi crée une belle association, trouvé des fonds, voyagé, organisé divers séminaires pour aider la recherche et a même donné des conférences ! Sabrina a préféré ne retenir que les aspects positifs de cette rencontre, malgré la souffrance. « Je ne regretterai jamais d’avoir donné naissance à Carson. Si mon fils pouvait vivre la moitié de ce que Carl a vécu, je serai comblée. Et au fond de moi, je suis sûre qu’il y parviendra. »
Extrait d’un article paru dans « C’est dit » N° 9 avril-mai 2011 : témoignage de la mère d’un enfant handicapé de la maladie de Duchenne.